Parmi les trois immeubles qui se sont effondrés le 5 novembre dernier, l’un était une copropriété.
Sans aucun doute, l’absence d’entretien des parties communes est l’une des causes principales de cette catastrophe.
Pourtant, ce qui est troublant, c’est que cet immeuble n’était pas répertorié dans le plan d’action des copropriétés dégradées, présenté le 10 octobre dernier par M. Mézard, ex-ministre de la Cohésion des Territoires, pour lequel l’Etat a mobilisé 3 milliards d’euros.
La raison est qu’il existe plusieurs dispositifs différents en fonction des typologies des copropriétés, faisant ainsi croire que les problématiques sont circonscrites et maîtrisables par l’Etat.
En effet, on parle d’un dispositif pour les copropriétés en difficulté, un autre pour celles dégradées ou encore pour celles en péril.
On retrouve ainsi différentes actions opérationnelles : OHAD, plan de sauvegarde, ORCOD…
Or, l’état général des copropriétés françaises est plutôt inquiétant justifiant que l’on ait alerté le ministre de la Cohésion des Territoires et des Relations avec les Collectivités Territoriales pour qu’il prenne conscience de l’ampleur du problème.
I. Des copropriétés qui ne sont pas organisées pour faire face à l’entretien de leur bâti
Il faut être clair, les réserves constituées dans la plupart des copropriétés ne permettent pas de faire face aux réels besoins de travaux d’entretien et de rénovation du bâti et des équipements collectifs.
Cela crée deux effets pervers.
En premier lieu un vieillissement du bâti et des équipements ce qui les rend moins performants et entraîne une surconsommation énergétique.
A cela s’ajoute un bâti moins stable avec la création de fissures ou de fuites dans les canalisations qui attaquent la structure et entraînent des corrosions des équipements.
Le deuxième élément est que ce défaut de financement prévisionnel des travaux provoque que chaque année les copropriétaires votent des menus travaux qui finalement coûtent très cher à l’immeuble plutôt que de réaliser des travaux ambitieux qui permettent d’englober plusieurs interventions de petit entretien.
Ainsi, c’est la double peine. Les copropriétaires ne réalisent pas les travaux pertinents et payent tout de même des interventions qui mises bout à bout reviennent quasiment aussi chères que les travaux de rénovation à réaliser.
II. Une remise à plat indispensable
On pourrait être démagogiques et expliquer que l’absence de vote de travaux trouve son origine dans la radinerie des copropriétaires.
Cette approche est inexacte sachant qu’en l’espace de dix ans les charges de copropriété ont augmenté de 40 %, impliquant que les copropriétaires ont dû chercher profondément dans leurs poches pour faire face aux seules dépenses courantes.
La raison est beaucoup plus profonde.
En premier lieu on constate une saturation financière des copropriétaires.
En effet, comment constituer une réserve travaux alors qu’en parallèle les charges courantes augmentent de manière effrénée chaque année.
Cela est d’autant plus scandaleux quand on sait qu’elles peuvent baisser d’au moins 30 % si les syndics voulaient bien engager une politique de maîtrise des charges.
Ainsi, la première action est d’obliger les syndics à mener une action de baisse des charges courantes des copropriétés.
Rappelons justement que les sommes à épargner pour faire face aux travaux d’entretien correspondent à 30 % du budget prévisionnel.
Autrement dit, sur la base d’un budget constant la mise en place d’une politique de maîtrise des charges permettrait de constituer une réserve travaux.
Le deuxième point est le matraquage des obligations à l’égard des syndicats des copropriétaires qui sont souvent abusives par leur nature mais en plus détournés par les professionnels.
Pour mémoire, on peut citer l’obligation de mise en conformité des ascenseurs qui a été détournée par les professionnels en modernisation des ascenseurs, l’obligation de travaux embarqués, l’individualisation des frais de chauffage…
L’ensemble de ces obligations qui ne vont pas dans le même sens ne permet pas une cohérence d’action mais surtout entraîne des dépenses importantes pour les copropriétaires qui se retrouvent ainsi dans l’incapacité de financer en parallèle une réserve travaux.
Autre point, aucun plan d’amortissement n’est prévu dans les copropriétés.
Pour le moment, c’est le copropriétaire qui vote les travaux qui doit intégralement les prendre en charge, même si les dégradations remontent à plusieurs années et que le lot a été acquis il y a un an.
Ce système peut créer une politique de l’autruche qui consiste à repousser chaque année les travaux ou leur financement prévisionnel, dans l’attente que le lot soit vendu pour ainsi passer la patate chaude au repreneur.
Voilà pourquoi il est essentiel d’instaurer un système équilibré avec une obligation de droit d’usage des parties et équipements communs qui impose aux copropriétaires de contribuer chaque année à l’amortissement des biens communs à partir de la politique de maîtrise des charges.
En effet, il faut bien comprendre que la question des travaux en copropriété ne se pose pas puisqu’ils s’imposent.
Celle qui reste en suspens est leur financement qui sera tôt ou tard indispensable à défaut d’avoir l’immeuble qui s’écroule.