Les parties communes et équipements collectifs des immeubles en copropriété sont régulièrement endommagés lors de sinistres dont les causes sont privatives (défaut d’entretien ou aménagements illicites réalisés sans l’aval nécessaire de l’assemblée générale, lorsqu’ils affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de la résidence).
Les syndics, et souvent sur l’impulsion du conseil syndical exaspéré par des incidents à répétition et les frais qui en découlent, peuvent alors été tentés d’imputer au copropriétaire responsable les frais de remise en état de ces éléments communs, conséquences de ces dommages.
La Cour de Cassation rappelle dans un arrêt du 12 avril 2018 le droit applicable en la matière.
I. Compétence du syndicat, du syndic et des copropriétaires pour l’entretien de l’immeuble
Il incombe :
- au syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, de veiller à la conservation de l’immeuble, ce qui s’entend de l’entretien des parties communes et des équipements collectifs (art. 14 de la loi du 10 juillet 1965).
A ce titre, les dépenses générées par ces travaux d’entretien ou de réparation doivent être réparties par le syndic auprès de chaque copropriétaire concerné selon les tantièmes attachés à son lot dans la grille de chargée correspondante stipulée par le règlement de copropriété (art. 10 de la loi du 10 juillet 1965) ;
- à chaque copropriétaire du lot d’assurer la maintenance de ses parties privatives (art. 2 de la loi du 10 juillet 1965).
II. Défaillance des intervenants et mise en œuvre des responsabilités
En cas de manquement à cet entretien constitutif d’un dommage, le responsable peut devoir répondre à l’égard de la victime du préjudice subi.
Ce sera :
- le syndicat, si le dommage résulte d’une carence dans l’entretien de la résidence (parties communes, équipements collectifs) selon le principe général de responsabilité délictuelle pour faute. Ce sont les articles 1240 et s. du Code civil (ex 1382 et s. avant le 1er octobre 2016) et retranscrit à l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 ;
- le copropriétaire, si le sinistre est imputable à ses parties privatives (art. 1240 et s. du Code civil) ;
- le syndic, s’il n’a pas mandaté les travaux urgents sur les parties communes nécessaires à la sauvegarde de l’immeuble (art. 37 du décret du 17 mars 1967). Sa responsabilité peut aussi être mise en jeu s’il outrepasse ses pouvoirs en sanctionnant un copropriétaire présumé fautif d’un désordre sur les parties communes.
En l’espèce, une copropriété est victime d’une fuite d’eau, qui nécessite le remplacement de la colonne montante de l’immeuble, équipement commun.
Le syndic, estimant que la cause de ce sinistre est une intervention privative de plomberie d’un copropriétaire, décide de lui imputer la dépense de réfection de la conduite d’eau collective.
Après avoir réglé la facture, le copropriétaire assigne personnellement le syndic en indemnisation.
Le juge de proximité rejetant cette demande, le copropriétaire se pourvoit en cassation.
La 3ème chambre civile de Cassation dans l’arrêt n° 17 - 15057 du 12 avril 2018, infirme la décision rendue par la juridiction inférieure :
«…Attendu que, pour rejeter la demande de M. X..., le jugement retient que le syndic, en imputant une réparation à un copropriétaire et non au syndicat, ne commet pas une faute délictuelle excédant son mandat de gestion et que M. X... n'établit pas une faute relevant de l'article 1382 du code civil imputable à la société SEBICAB immobilier ;
Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que le syndic avait imputé à un copropriétaire et non au syndicat une réparation sur une canalisation, partie commune, la juridiction de proximité, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ; »
Il convient de noter que c’est le syndic qui a été condamné et non pas le syndicat des copropriétaires pour ne pas avoir imputé cette charge, correspondant à une remise en état d’une partie commune, au syndicat des copropriétaires.
Cette décision du syndic devait respecter les principes applicables.
Le syndicat des copropriétaires aurait dû rechercher la responsabilité du copropriétaire dès la survenance du sinistre, par l’intermédiaire de son syndic et en établir la preuve pour que le lien de causalité entre le dommage ET l’action du copropriétaire soit fondé.
Les motivations louables d’un syndic - ou du conseil syndical - ne doivent néanmoins pas les conduire à se substituer à un magistrat, seule autorité souveraine pour constater une faute, un dommage, le lien de causalité entre les deux et sanctionner le responsable, si un accord préalable entre les parties et/ou leur assurance n’a pas été trouvé au préalable.
Il ne peut donc décider seul de qui doit prendre en charge les travaux de remise en état.