Quelles sont les conséquences de l’annulation judiciaire d’une résolution d’assemblée générale refusant de ratifier des travaux privatifs affectant les parties communes
Toute copropriété est un jour confrontée à un projet de travaux ou une exécution illicite par un copropriétaire de travaux privatifs affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble.
Nous sommes régulièrement interrogés par des conseils syndicaux sur les actions à entreprendre et la position qu’ils peuvent adopter quand des travaux sur des parties communes sont réalisés par un copropriétaire sans autorisation préalable de l’assemblée générale.
La Cour d’Appel de Paris, dans un arrêt du 26 avril 2017, rappelle la procédure à suivre par un copropriétaire pour pouvoir exécuter ce type de travaux légalement et les conséquences dommageables pour celui qui y contreviendrait.
I. La voie légale : l’autorisation sollicitée au préalable
Tout copropriétaire, qui entend réaliser à ses frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble (branchement à une descente, d’alimentation, d’évacuation commune, percement d’un mur porteur ou d’un plancher communs, réfection des fenêtres par un modèle différent ou création de fenêtre…), doit requérir de l’assemblée générale une autorisation à la majorité des voix du syndicat (art. 25 alinéa b de la loi du 10 juillet 1965). Cette demande doit être faite préalablement aux travaux
Il appartient donc au copropriétaire demandeur, de notifier au syndic pour inscription à l’ordre du jour de l’assemblée générale (art. 10 du décret du 17 mars 1967) :
- la question qui doit être inscrite à l’ordre du jour : autorisation des travaux à M. Mme… propriétaire du lot … ;
- le projet de résolution correspondant : L’assemblée générale autorise… ;
- un dossier technique sur les travaux envisagés (descriptif, devis, attestation d’assurance de responsabilité professionnelle de l’entreprise…) permettant aux copropriétaires de pouvoir se prononcer en parfaite connaissance de cause.
II. L’alternative judiciaire en cas de refus du syndicat
Si le copropriétaire constate que l’assemblée générale bloque sa demande de manière abusive (donc sans motivation objective), il pourra alors agir judiciairement en vue d’obtenir :
- d’une part, l’annulation de la résolution du syndicat, ce qui implique que l’action soit exercée au plus tard dans le délai de deux mois suivant la notification du procès-verbal par le syndic (art. 42 de la loi du 10 juillet 1965) ;
- d’autre part, l’autorisation judiciaire de les exécuter (art. 30 de la loi du 10 juillet 1965).
Nous sommes donc en présence de deux demandes du copropriétaire, qui se basent sur deux articles différents.
Dans son arrêt n°15 - 04355 du 26 avril 2017, la Cour d’Appel de Paris confirme le jugement du T.G.I. de Paris à savoir que l’action en annulation d’un refus abusif de l’assemblée générale de travaux privatifs ne se confond pas avec la demande de ratification judiciaire de ces aménagements.
La cour a en effet annulée la résolution pour refus abusif, mais a refusé d’entériner les travaux. L’autorisation doit être sollicitée par le copropriétaire avant toute réalisation des travaux.
L’argumentation juridique des magistrats est suffisamment explicite pour être reprise en l’état :
«Reprenant les motifs pertinents des premiers juges selon lesquels l'expert avait constaté que les travaux avaient été réalisés dans les règles de l'art et qu'ils étaient nécessaires pour mettre les installations sanitaires du studio en conformité avec les prescriptions du règlement sanitaire départemental, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu que l'assemblée générale des copropriétaires ne pouvait donc refuser, sans commettre un abus de majorité, de donner à Mme M. l'autorisation qu'elle sollicitait a posteriori et que la résolution n° 5 de l'assemblée générale du 25 mars 2013 doit être annulée, étant rappelé que cette annulation ne vaut pas autorisation judiciaire de travaux… »
…/…
« Il est constant que la saisine du tribunal ne peut plus intervenir à partir du moment où de sa propre autorité et sans avoir reçu l'autorisation du syndicat, un copropriétaire a entrepris d'effectuer les travaux, le juge ne peut plus fixer les conditions de l'autorisation comme le prévoit l'article 30, alinéa 4, de la loi du 10 juillet 1965 ; un copropriétaire qui a, de ça propre autorité et sans avoir obtenu l'autorisation du syndicat des copropriétaires, procédé à des travaux affectant les parties communes et l'aspect extérieur de l'immeuble, ne peut demander en justice l'autorisation prévue à l'article 30, alinéa 4, de la loi du 10 juillet 1965, le juge ne pouvant désormais fixer les conditions de l'autorisation comme le prévoit ce texte… »
En conclusion
Les juges ne peuvent donc pas ratifier des travaux déjà exécutés par un copropriétaire, sans autorisation préalable, même s’ils considèrent le refus de l’assemblée générale comme abusif.
L’autorisation est donc obligatoirement antérieure à l’exécution.
Cet arrêt confirme aussi qu’un copropriétaire ne peut pas se faire « justice lui-même », et décider de procéder à des travaux qui auraient été refusés par l’assemblée générale en espérant les faire ratifier par le juge.
Tout copropriétaire doit donc respecter la voie légale préalablement à ses travaux, afin de ne pas encourir, comme en l’espèce, des conséquences matérielles non négligeables, à savoir la destruction des travaux illégaux et des condamnations élevées (150 euros d’astreinte journalière jusqu’à suppression des travaux illicites, 2.000,00 euros de dommages et intérêts, 3.000,00 euros d’article 700 du Code de procédure civile, ainsi que les dépens d’appel).