La régularité de la tenue de l’assemblée générale d’un ensemble immobilier privatif (copropriété ou ASL) donne souvent lieu à discussion et contestation.
Un arrêt de la Cour de Cassation du 14 juin 2018 rappelle le fondement juridique du fonctionnement d’une ASL et souligne la conséquence radicale pour cette dernière en cas de manquement à ces règles.
I. Le fonctionnement d’une ASL, notamment la tenue de son assemblée générale, relève de ses statuts
Il existe souvent une confusion dans les esprits entre le régime juridique d’un ensemble immobilier lorsqu’il est :
- en syndicat de copropriétaires et relève d’un règlement de copropriété, établi et publié au Fichier immobilier et de dispositions légales (loi du 10 juillet 1965) et réglementaires (décret du 17 mars 1967) dont la plupart sont d’ordre public donc impératives ;
- en Association Syndicale Libre (ASL) qui est soumise principalement à ses statuts, approuvés lors de sa création pour tous les membres (colotis ou associés) qui sont propriétaires d’un lot dans le périmètre de son intervention.
Les textes régissant les ASL sont beaucoup moins nombreux que pour les copropriétés. Ce ne sont que quelques articles d’une ordonnance du 1er juillet 2004 et de son décret d’application du 3 mai 2006 qui fixent des grands principes, à charge pour les statuts de les préciser.
Aucun de ces textes n’organise les assemblées générales des membres de l’ASL.
Ce sont donc les membres qui déterminent librement dans leurs statuts les règles de fonctionnement de leur ASL (art. 7 de l’ordonnance du 1er juillet 2004) et, entre autre, les règles de convocation et de tenue des assemblées générales.
II. Le non-respect des statuts lors d’une assemblée générale d’une ASL entraine sa nullité judiciaire de plein droit
Une ASL tient son assemblée générale ordinaire le 29 juillet 2013.
Un couple de propriétaires d’un lot sis dans le périmètre d’intervention de l’ASL constate diverses violations des statuts dans la tenue de cette réunion annuelle, à savoir un décompte des voix erroné, l’absence des adresses des propriétaires sur la feuille de présence, le défaut de désignation d’un mandataire commun pour les biens en indivision ou copropriété.
Ils engagent une action en nullité contre l’assemblée générale. N’ayant pas obtenu gain de cause devant la Cour d’appel, ils se pourvoient en cassation.
La Cour de Cassation dans sa décision n° 17 - 20692 du 14 juin 2018 fait droit à leur requête, par une application littérale des dispositions contenues dans les statuts et parfaitement licites :
« […] Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que le défaut, en contradiction avec les statuts mais sans influence sur le décompte des voix, de désignation d'un mandataire ou d'un syndic de copropriété pour l'exercice du vote d'un même lot, ne constitue pas une cause de nullité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la nullité de l'assemblée générale d'une association syndicale résulte du seul fait que cette assemblée n'a pas respecté les règles statutaires relatives aux modalités de vote, la cour d'appel a violé le texte susvisé […] »
La Cour de Cassation a considéré que les statuts d’une ASL sont impératifs et que leur violation conduit à la nullité de l’assemblée générale, même si cela n’avait aucune incidence sur le résultat des votes.
Elle a donc appliqué strictement les dispositions de l’article 1134 du Code Civil (rédaction avant l’ordonnance du 10 octobre 2016).
Dans cette affaire, deux personnes étaient propriétaires du même lot et ont voté chacune pour moitié des tantièmes attribués à leur lot, et de la même manière. Mais comme les statuts disposaient que les lots en copropriétés ou en indivision devait être représenté par un mandataire, les demandeurs ont obtenu la nullité de l’assemblée générale pour le non-respect de cette clause.
Dans les ASL, il est nécessaire de respecter les statuts. En effet, dans le silence des textes, un membre, contrairement à un copropriétaire, est fondé à requérir la nullité par voie judiciaire de l’assemblée générale de l’ASL pour toute violation des règles statutaires de convocation ou de tenue, alors même qu’il aurait voté favorablement ou se serait abstenu.
Sauf disposition contraire des statuts, cette action est possible dans le délai de droit commun de 5 ans à compter des faits incriminés (art. 2224 du Code civil).