Décidemment, le CNTGI aura fait couler beaucoup d’encre alors que son efficacité reste encore à prouver et qu’une partie de ses attributions n’est jamais entrée en vigueur.
Pour mémoire, cette instance a connu énormément de chamboulement puisqu’après avoir été instituée par la loi ALUR en mars 2014, elle a ensuite été modifiée à deux reprises par la loi Egalité et Citoyenneté de janvier 2017, pour à présent subir des transformations dans le cadre du projet de loi Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique (ELAN).
Il ne faut pas se leurrer. L’objectif des professionnels qui exercent leur lobby auprès du Ministère est simple : comment prendre la main sur cette instance et surtout éviter que l’ARC ne puisse y siéger.
C’est sûr que la vie serait moins compliquée pour eux si notre association n’était pas présente au sein de cette commission.
Voyons donc les évolutions prévues dans l’article 53 du projet de loi ELAN en matière de composition et de pouvoir du futur CNTGI.
I. La présence de personnes qualifiées sans pouvoir de vote
Lors des négociations sur la loi Egalité et Citoyenneté, les professionnels voulaient que les trois personnes qualifiées dans le domaine de l’immobilier et du droit de la copropriété soient supprimées des membres du CNTGI.
L’objectif recherché est de se retrouver uniquement face aux associations de consommateurs agréées qui ne sont pas des expertes du droit de la copropriété et surtout des abus des syndics.
Plus encore, derrière cette tentative se cache la volonté d’interdire à l’ARC de pouvoir siéger à cette commission en tant qu’experte de la copropriété pour contrer les arguments ou les stratégies des syndics professionnels.
Grâce à notre persévérance, et surtout, il faut le reconnaître, grâce au Ministère de la Cohésion et des Territoires qui est conscient des graves dérives que commettent les syndics, la présence des trois personnes qualifiées a été maintenue.
Ceci étant, comme nous allons le constater, les professionnels ont réussi à obtenir une nouvelle reculade du ministère.
Ainsi, la composition du CNTGI devrait être la suivante :
- Sept professionnels de l’immobilier.
- Cinq membres d’associations représentant les consommateurs agréées.
- Trois personnes qualifiées dans l’immobilier et dans la copropriété.
- Un président nommé par le Ministère de la Justice.
Néanmoins, la nouvelle rédaction de l’article 53 précise à présent que les trois experts en copropriété ne disposent pas du droit de vote et ont un avis seulement consultatif.
Ainsi, ces derniers seront réduits uniquement au statut d’observateurs, laissant au final le dernier mot aux professionnels.
A défaut d’obtenir une évolution des textes, ce qui est peu probable, l’ARC se posera en tant voulu la question de savoir si elle siège à cette commission qui est un simulacre de démocratie.
II. Un pouvoir disciplinaire revu à la baisse
Originellement le CNTGI devait intégrer une instance disciplinaire en charge de sanctionner les syndics qui ont commis une faute en ne respectant pas une obligation légale, réglementaire ou déontologique.
Cette instance n’a jamais vu le jour malgré la publication d’un décret en date du 10 mai 2017, qui prévoyait une entrée en vigueur au 1er juillet 2018.
Selon le Ministère de la Cohésion et des Territoires, la raison de ce blocage est purement économique puisque selon leur estimation, le coût de fonctionnement de cette instance serait astronomique avec une efficacité qui serait relative.
L’article 53 prévoit un nouveau modèle qui consisterait à maintenir la notion de commission disciplinaire mais avec un fonctionnement beaucoup plus simple.
Il consisterait uniquement à instruire le dossier sur les pratiques abusives constatées auprès d’un syndic et qui, si elles sont suffisamment graves, seront transmises à la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF).
Sa composition est de cinq représentants des professionnels et cinq représentants des associations, auxquels s’ajoute un président.
Il faut être clair, il s’agit d’un nouveau pas en arrière.
En effet, les petits cabinets passeront au bûcher pendant que les grands groupes, qui seront représentés au sein du CNTGI, pourront continuer à faire la pluie et le beau temps.
Plus encore, en l’état actuel de l’article, le syndicat des copropriétaires, qui a subi le préjudice et qui est à l’origine du signalement ne sera au courant ni de l’instruction réalisée par la commission de contrôle, ni de la sanction éventuelle prononcée par la DGCCRF.
Cette solution est perverse puisque les syndicats des copropriétaires n’auront pas réparation de leur préjudice, entraînant qu’ils ne seront pas incités à saisir la commission de contrôle, qui se targuera alors des faibles plaintes présentées.
Nous allons donc saisir sans plus tarder les députés pour les alerter de cette bavure, qui est contraire aux intérêts de huit millions de copropriétaires.