Le cadre législatif a largement évolué au cours des dernières décennies en offrant de nouveaux moyens de lutte contre la dégradation des copropriétés.
À ces nombreux outils, tels que la procédure d’alerte, l’administration provisoire, le permis de louer, etc. dont nous avons pu démontrer parfois la perfectibilité, s’ajoute celui de l’astreinte administrative.
Voyons ensemble quelles sont les modalités de sa mise en œuvre et son intérêt pour les copropriétés dégradées.
I. L’astreinte administrative : mise en place, modulation et progressivité
La loi ALUR, dans son article 83, indique que pour les arrêtés d’insalubrité remédiable, de péril ordinaire et ceux relatifs à la sécurité des équipements communs des immeubles collectifs d’habitation, et des établissements recevant du public à usage partiel ou total d’hébergement, l’autorité administrative compétente (Maire ou Préfet) peut, après mise en demeure, mettre en place une astreinte financière via la prise d’un nouvel arrêté.
Le montant maximal de l’astreinte est de 1 000 € par jour de retard et par arrêté et doit être « progressif dans le temps et modulé ». Par ailleurs, le total des sommes demandées à un même propriétaire dans le cadre d’un même arrêté ne peut être supérieur à 50 000€.
L’astreinte est supportée par la personne physique ou morale défaillante tenue d'exécuter les travaux prescrits par l'arrêté. Elle peut donc aussi bien s’adresser au syndicat des copropriétaires, si l’arrêté porte sur les parties communes, qu’au(x) copropriétaire(s) dont le(s) lot(s) est (sont) frappé(s) d’arrêté.
Dans le premier cas :
- si l'inexécution des travaux prescrits résulte de l'absence de décision du syndicat des copropriétaires en assemblée générale, le montant de l'astreinte dû est notifié à chacun des copropriétaires et recouvré par l'autorité publique à l'encontre de chacun d'eux
- si l’inexécution des travaux prescrits et votés par l’assemblée résulte de la défaillance de certains copropriétaires (impayés), l'autorité publique notifie, par arrêté, le montant de l'astreinte dû par chacun des seuls copropriétaires défaillants.
II. De l’opportunité de la mise en place d’une astreinte administrative et de ses limites
En établissant une distinction entre l’astreinte administrative en parties privatives et celle en parties communes, le législateur a su anticiper les difficultés rencontrées par les copropriétés visées par un arrêté de péril ou d’insalubrité.
En effet, trop souvent, nous voyons des copropriétés « empêchées » de réaliser des travaux en parties communes, votés par l’assemblée générale, faute de paiement des charges par certains copropriétaires.
Ainsi, en ciblant l’astreinte administrative sur les seuls copropriétaires en impayés, l’autorité administrative envoie un signal fort dans la lutte contre les copropriétés dégradées.
À ce titre, si l’astreinte administrative n’a fait l’objet d’aucune évaluation à ce jour, elle semble toutefois être un outil approprié dans la lutte contre les bailleurs indélicats.
Cependant, notons que la mise en place de cette astreinte, nécessite pour l’autorité concernée de disposer de personne dédié, alors même que le produit de l’astreinte, après prélèvement de 4 % pour frais de recouvrement, est versé au budget de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). Cette disposition risque de freiner la mise en place de l’astreinte administrative, les ressources nécessaires à son suivi étant de fait limitées et sa mise en place en aucune façon obligatoire…
L’astreinte administrative représente une réelle opportunité pour les copropriétés dégradées en incitant les copropriétaires débiteurs à payer leurs charges et en contrant les copropriétaires indélicats.
Reste à savoir comment cet outil sera utilisé par les administrations compétentes, sachant l’investissement que représente sa mise en place alors même que le fruit financier n’est pas exclusivement à destination de l’autorité initiatrice.