Attention : pourquoi et comment les syndics font voter illégalement des augmentations d’« avance de trésorerie » ?
Comment échapper simplement à ces pratiques ?
À lire absolument
I. Les syndics en mal de « trésorerie » à placer à leur profit
Comme nous cessons de le dire, la perversion (c’est le mot juste) du « compte unique » (ou du faux compte séparé) est qu’il incite les syndics à mettre en place tous les moyens possibles pour augmenter en permanence la trésorerie disponible de leurs copropriétés, ce qui leur permet à eux, syndics, de générer un maximum de produits financiers sur leur compte (unique).
Pour cela les syndics ont mis en place de nombreuses pratiques préjudiciables à l’intérêt des copropriétaires, par exemple :
- paiement des fournisseurs le plus tard possible (entraînant une surfacturation des fournisseurs) ;
- augmentation des budgets prévisionnels annuels au-delà de ce qui est nécessaire ;
- maintien de fonds de roulement inutiles et manœuvres pour augmenter les avances existantes jamais placées au profit des copropriétaires... ;
- absence de répartition des produits en fin d’exercice ;
- lancement des travaux le plus tard possible après l’envoi des appels de fonds, etc. ;
Un de ces moyens est de maintenir et d’augmenter en permanence des fonds appelés abusivement « avance permanente de trésorerie ».
Nous allons voir - à partir d’exemples précis liés à des assemblées générales 2013 en préparation - à la fois comment pratiquent beaucoup de syndics et à la fois pourquoi ils sont si souvent dans l’illégalité.
II. Rappel préalable concernant l’« avance permanente de trésorerie »
Le problème est, en effet, simple :
- Si votre règlement de copropriété prévoit une « avance permanente de trésorerie » (ce qui est rare), votre syndic peut proposer une éventuelle augmentation de celle-ci, dès lors que cette augmentation respecte bien les dispositions du dit règlement et - surtout - que le syndic explique POURQUOI il y a besoin d’augmenter l’avance.
- Mais, si votre règlement ne prévoit rien, alors le syndic ne peut créer ou augmenter une telle réserve qu’à la double majorité de l’article 26 (deux tiers des millièmes et la moitié des copropriétaires en nombre).
On va voir, concrètement, l’importance pratique d’un tel rappel, étant donné que neuf syndics sur dix font voter de telles résolutions à la majorité de l’article 24.
III. Des syndics qui confondent volontairement « fonds de roulement » ou « avance pour charges » et « avance permanente de trésorerie »
Comme on le sait, jusqu’en 2002 dans beaucoup de syndicats de copropriétaires, les charges étaient payées à la fin de chaque trimestre. Il fallait donc une avance de provision trimestrielle, prévue dans les contrats (souvent appelée « fonds de roulement »).
Lorsque la loi a imposé de passer au système des charges provisionnelles, les syndics ont appelé les charges en début de trimestre et n’ont plus eu besoin de ce« fonds de roulement ». Celui-ci a donc (du moins dans les copropriétés adhérentes à l’ARC) été remboursé aux copropriétaires ou transformé en « fonds travaux » placés au profit du syndicat des copropriétaires.
Néanmoins, de nombreux syndics - face à la passivité ou à l’ignorance des copropriétaires - ont conservé ce fonds de roulement sans le placer au profit des copropriétaires et ont - un jour ou l’autre - habilement débaptisé ce fonds pour l’appeler « avance permanente de trésorerie », oubliant - comme par hasard - que cette transformation DEVAIT se faire à la double majorité de l’article 26 (deux tiers des millièmes et majorité des copropriétaires).
C’est d’ailleurs ce que la Commission Relative à la Copropriété a confirmé en 2008 à la demande de l’ARC qui est l’un des douze membres permanents de cette commission :
« Recommandation de la Commission Relative à la Copropriété n°8 du 7 janvier 2008 relative aux appels de fonds que le syndic peut exiger des copropriétaires.
(...)
4- constituant la réserve prévue au règlement de copropriété
En ce qui concerne l’avance, la Commission rappelle :
- que cette avance remplace l’avance de trésorerie permanente prévue par l’ancienne réglementation ;
- que, comme par le passé (...) elle peut être instituée par l’assemblée générale, mais uniquement, à la majorité de l’article 26 de la loi ».
Voyons maintenant comment les syndics s’y prennent.
IV. Premier exemple
Il y a quelques jours des adhérents nous adressent copie d’une résolution mise à l’ordre du jour (par un cabinet NEXITY) de leur prochaine assemblée générale :
« Ajustement de l’avance permanente de trésorerie (Art.35 du Décret du 27/05/2004). Vote à l’article 24 »
« En application des dispositions de l’Art. 35 du décret du 27/05/2004, l’Assemblée Générale décide d’ajuster l’avance permanente de trésorerie au 1/6e du budget de fonctionnement.
Son montant était de 35 000,00 €
Il est arrêté à : 88 645,83 €
Un premier appel de fonds sera effectué le 15/06/2013 ».
[Oui, vous avez bien lu : passage de 35.000 à 88.645,83 €].
La question et la résolution telles qu’elles sont libellées sont à la fois trompeuses et, en l’occurrence, illégales, ce qui ne nous étonne pas du syndic NEXITY.
En effet :
- elles laissent entendre qu’elles sont « dictées » par « l’article 35 du décret du 27 mai 20004 » ;
- on notera d’abord (ce qui est cocasse) que le décret du 27 mai 2004 n’a PAS d’article 35 et que le syndic a confondu avec l’article 35 du décret du... 17 mars 1967 modifié en 2004... Bravo l’artiste.
- Par ailleurs et contrairement à ce que dit le syndic, l’article 35 se contente seulement de préciser ceci :
« Le syndic peut exiger le versement :
1° de l’avance constituant la réserve prévue au règlement de copropriété, laquelle ne peut excéder 1/6 du montant du budget prévisionnel ».
Or, en l’occurrence, le règlement ne prévoit AUCUNE avance permanente de trésorerie et la somme actuelle de 35.000 euros est un reste de l’ancien fonds de roulement, qui aurait d’ailleurs du être remboursé aux copropriétaires depuis 2002.
Le syndic n’a donc PAS le droit de faire voter à la majorité de l’article 24 le passage de la somme de 35.000 euros à 88.645,33 euros, qui va uniquement lui permettre de placer À SON PROFIT EXCLUSIF 43.645 euros de plus.
V. Deuxième exemple
Autre exemple de la façon qu’ont les syndics d’augmenter leurs « maigres revenus ».
Voici une autre question et résolution dans une autre copropriété (cabinet Saint SIMON à Versailles) :
« Approbation du budget prévisionnel de l’exercice du 01/01/2013 au 31/12/2013 pour un montant de 341 761,00 € (Article 24 : Majorité des voix exprimées des copropriétaires présents et représentés).
- « Conformément aux dispositions de l’article 43 du décret du 17 mars 1967, l’assemblée générale approuve le budget prévisionnel joint à la convocation pour l’exercice du 01/01/2013 au 31/12/2013. Le budget, détaillé par postes de dépenses, a été établi par le syndic assisté du conseil syndical arrêté à la somme de 341 761,00 € et sera appelé par provisions trimestrielles exigibles le 1er jour de la période fixée.
- « L’assemblée générale décide d’ajuster l’avance permanente de trésorerie à 56 960,00 Euros soit 1/6 du budget du fonctionnement ».
Ici le syndic commet deux illégalités :
- il fait voter à l’article 24 une augmentation d’avance permanente de trésorerie qui - là encore - n’est PAS prévue au règlement ;
- il fait voter DEUX points différents (budget et augmentation de l’avance) dans la même résolution.
Dans ce cas, les copropriétaires ont deux bonnes raisons de ne pas satisfaire à la demande du syndic et de refuser l’augmentation de l’ancien « fonds de roulement ».
Mieux : nous incitons, dans un tel cas, les copropriétaires à faire voter à la place la résolution suivante :
« L’assemblée générale constatant que ce que le syndic appelle « avance permanente de trésorerie » n’est pas prévu au règlement de copropriété et n’est autre qu’un reste du « fonds de roulement » - inutile depuis le passage au système des charges provisionnelles - demande au syndic de transformer ce fonds en « fonds travaux » qui sera placé sur un compte spécial au profit du syndicat des copropriétaires ».
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