Le syndicat des copropriétaires peut, pour récupérer les dettes, prendre une hypothèque directement sur le lot du copropriétaire débiteur.
Pour cela, il est nécessaire qu’un commandement d’huissier spécial soit adressé au préalable, il est défini par l’article 19 de la loi du 10 juillet 1965, et on le nomme plus quotidiennement « commandement de payer ».
Cet acte officiel a un coût de l’ordre de 100 à 200 euros, et c’est pourquoi il doit être utilisé dans le cas de dettes importantes et d’échec d’échéanciers de paiement avant d’être enclenché.
Malheureusement, certains syndics utilisent à tort et à travers cette arme, comme l’illustre le cas d’un syndic de Savoie, LUDIMMO (TIT Syndic) que nous allons voir ensemble.
I. Des copropriétaires qui ajustent le paiement de leurs charges travaux aux dates réelles de chantier
L’assemblée générale de mai 2017 d’une copropriété localisée en Savoie vote des travaux importants de ravalement.
Elle décide d’un échéancier de paiement par quart, exigibles aux 01/06/2017, 01/07/2017, 01/08/2017 avec un solde au 01/09/2017.
Fin juillet 2017, le syndic informe par courrier individuel chaque copropriétaire de la convocation prochaine d’une nouvelle assemblée générale qui confirmera ou infirmera ces travaux, les copropriétaires sont en effet convoqués fin novembre.
Les diverses formalités administratives préalables contraignent alors à décaler le lancement des travaux au plus tôt à début mars 2018, ce que confirme l’assemblée de novembre 2017.
Certains copropriétaires décident alors de décaler le paiement de leurs charges travaux en conséquence.
Fin octobre 2017, ils reçoivent alors un commandement de payer par voie d’huissier.
II. Le syndic a fait délivrer à ces copropriétaires des commandements de payer
Ce commandement de payer n’a été précédé d’aucun courrier de relance, ni de mise en demeure.
Aucune pièce n’était jointe à l’acte de l’huissier qui commandait simplement de payer la somme due.
Ce document ne répondait donc pas au formalisme requis, et ne constitue donc pas une mise en demeure.
La prestation du syndic a donc été limitée : la simple communication d’une somme à l’huissier.
Pour ce « travail », le syndic a mis à la charge de chaque copropriétaire deux sommes pour un total exorbitant :
- Les frais d’huissier pour un montant de 170,43 €
- Sa prestation de « suivi » pour un montant de 192 €.
Voilà sur quels motifs les copropriétaires auraient dû ne pas s’acquitter de ces sommes :
En ce qui concerne l’acte d’huissier :
L’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit :« sont imputables au seul copropriétaire concerné : les frais nécessaires exposés par le syndicat, notamment les frais de mise en demeure, de relance et de prise d'hypothèque à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d'une créance justifiée à l'encontre d'un copropriétaire ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers de justice et le droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du débiteur ;… »
- Puisqu’il n’y a pas eu de mise en demeure préalable de payer, le commandement ne peut être mis à la charge du copropriétaire débiteur. En effet, le seul acte requis pour enclencher la procédure de recouvrement est la mise en demeure faite par le syndic en lettre avec accusé de réception.
- Ce commandement de payer n’est pas un acte d’huissier pour lequel des droits ou émoluments sont versés. Il s’agit ici d’un acte indépendant de toute procédure judiciaire et la somme demandée serait versée pour son exécution. Ces frais d’huissier ne peuvent donc pas être imputés aux copropriétaires.
En ce qui concerne la rémunération du syndic :
Elle est illégale, car le contrat type de syndic ne prévoit nullement une rémunération relative aux commandements de payer.
Par ailleurs, il ne s’agit pas non plus d’un acte requérant du syndic une diligence exceptionnelle.
De surcroit le syndic utilise ce commandement de payer pour se dispenser de relancer les copropriétaires débiteurs et suppléer donc sa propre défaillance.
S’agissant d’une dizaine de copropriétaires concernés, le syndic a bénéficié d’une rémunération de l’ordre de 2.000 € pour simplement transmettre les dossiers, sous-traiter le recouvrement de charges et ne pas exécuter sa prestation…
Et « plus fort de café » encore, ce syndic a mis à l’ordre du jour de l’assemblée générale de novembre 2017, la saisie des lots appartenant aux copropriétaires qui n’avaient pas encore payé l’intégralité de leurs charges travaux.
En conclusion : ces frais d’huissier ne doivent pas être payés par les copropriétaires et seront pris en charge par le syndic qui a failli à sa mission d’administrateur.