Nous avons déjà alerté sur notre site Internet au sujet de l’accélération des syndics et surtout des groupes à constituer des filiales afin d’augmenter tous azimuts leur chiffre d’affaires au motif des obligations qui gravitent autour de la gestion des copropriétés.
Pire encore : certains syndics commencent à réfléchir pour proposer des services annexes à la gestion des copropriétés du type « services à la personne... ».
Concernant le groupe Foncia, nous avons dénoncé sa société de courtage en assurance : « Assurimo », son service 24h/24 7j/7, et sa filiale « Prowen » chargée de négocier les tarifs de l’énergie.
Voir par exemple : www.arc-copro.com/3tnu et www.arc-copro.com/9ef3.
Avec les nouvelles obligations d’audit énergétique et d’audit global, voici que le groupe Foncia remet en avant dans les convocations d’assemblées générales sa filiale de bureaux d’études « Constatimmo » et ce en dépit des dispositions de l'article R134-17 du code de la construction et de l'habitation qui précise que:
"Les personnes qui réalisent des audits énergétiques doivent justifier de leur souscription à une assurance leur permettant de couvrir les conséquences d'un engagement de leur responsabilité en raison de leurs interventions. Elles doivent justifier de leur impartialité et de leur indépendance à l'égard des syndics, des fournisseurs d'énergie et des entreprises pouvant intervenir sur le bâtiment et les équipements sur lequel porte l'audit énergétique"
Malgré cet impératif règlementaire, nous allons expliquer comment ce syndic essaye de faire passer « en force » son bureau d’études pour ensuite expliquer pourquoi il n’est jamais bon pour la copropriété d’opter pour une société filiale du syndic.
I. Un passage quasi en force du bureau d’études
Bien souvent, pour contraindre le syndicat de copropriétaires à opter pour une société filiale du syndic, ce dernier déroge aux obligations légales et règlementaires.
En effet, alors que l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 oblige le syndic à mettre en concurrence les contrats à partir du moment où le seuil des marchés est atteint, certains syndics outrepassent subtilement cet impératif, d’autant plus lorsqu’il s’agit de faire passer leurs filiales.
Voyons donc une résolution relevée sur une convocation d’assemblée générale du cabinet Foncia Lacombe au sujet de sa filiale « Constatimmo » :
« Réalisation d’un audit énergétique [...]
Elle confie la mission à la CONSTATIMMO pour un montant de Euros incluant une présentation des résultats lors de la prochaine assemblée. Conformément à l’article 39 du décret du 17 mars 1967, il est précisé que la CONSTATIMMO est filiale du groupe FONCIA.
L’assemblée générale délègue au conseil syndical la faculté de rechercher une offre concurrentielle, aux conditions équivalentes, dans un délai de 2 mois.
Le syndic est autorisé à procéder, selon la clé de répartition « charges communes générales » aux appels de provisions exigibles aux dates suivantes [...] ».
Cette résolution présente plusieurs difficultés juridiques.
En effet, le syndic présente uniquement l’offre de « Constatimmo » sans prévoir de contrat concurrent. Cela est donc contraire aux exigences légales.
Mais plus encore, cette question est gigogne puisqu’elle prévoit dans une même résolution aussi bien le vote du choix du bureau d’études que la délégation de pouvoir au conseil syndical.
Par ce procédé les copropriétaires sont donc contraints de valider ou, au contraire, de refuser l’intégralité des deux décisions.
Ce système permet donc au cabinet Foncia Lacombe de verrouiller le dispositif en imposant soit de voter pour la filiale du groupe Foncia avec une possibilité de délégation « artificielle » (voir point suivant) soit de tout refuser en bloc.
Néanmoins, l’assemblée générale ne devra pas se laisser intimider par ce type de procédé.
En effet, les copropriétaires sont libres de modifier la résolution à partir du moment où elle reste conforme à la question portée à l’ordre du jour.
Ainsi, les copropriétaires devront reprendre la résolution proposée par le syndic en ne gardant que la délégation de pouvoir au conseil syndical, et en supprimant purement et simplement le seul choix de faire appel à la filiale du syndic.
Et oui, si le syndic se prend pour le renard de la fable de la Fontaine, les conseillers syndicaux sauront lui montrer qu’ils ne sont pas des oiseaux et qu’ils ne lâchent pas leur fromage.
II. Une résolution pernicieuse
Le syndic prévoit une résolution qui semble ouvrir la mise en concurrence, en proposant une délégation de pouvoir au conseil syndical qui s’avère biaisée.
Pourquoi ? Parce que la résolution donne deux mois au conseil syndical pour trouver un bureau d’études qui proposerait une « offre concurrentielle aux conditions équivalentes ».
Au-delà de ce délai extrêmement court, il est quasi impossible pour le conseil syndical de trouver un bureau d’études qui, en tous points, proposerait des conditions d’exécution rigoureusement identiques à celles présentées par le cabinet « Constatimmo ».
Il y aura toujours des éléments de différenciation entre une offre et une autre. Cela est d’ailleurs sain, puisqu’une mise en concurrence permet, au-delà de la comparaison des coûts, d’étudier les différentes approches d’intervention.
Il est donc dénué de sens d’imposer au conseil syndical de choisir un bureau d’études qui au final est censé faire un copié collé de l’offre de « Constatimmo » et de garder comme seul élément de décision le tarif.
Cette ouverture est donc en réalité une porte fermée qui a pour objet de verrouiller la nomination définitive du bureau d’études « Constatimmo » pour réaliser l’audit énergétique.
III. Les risques pour le syndicat de copropriétaires
La véritable difficulté avec le choix d’une filiale du syndic est le conflit d’intérêt que ce dernier peut avoir entre la préservation des intérêts du groupe et de ceux du syndicat de copropriétaires, qu’il représente.
En effet, en cas de litige avec la filiale du syndic suite à une mauvaise exécution de son contrat, le cabinet « freinera des deux fers » pour engager sa responsabilité.
Cela n’est pas une hypothèse, mais un constat de terrain qui a pu être relevé lorsque la copropriété décidait de faire appel, par exemple, au cabinet de courtage d’assurance du syndic.
Le contrat était, certes, moins cher que les concurrents, mais le syndic « traine des pieds » pour déclarer le sinistre afin que la compagnie n’ait pas à prendre en charge son remboursement.
Il est donc essentiel de garantir un partage strict des missions :
- le syndic représente uniquement les intérêts du syndicat de copropriétaires ;
- le bureau d’études est une structure indépendante n’ayant aucun rapport avec le syndic, un copropriétaire ou une société ;
- le conseil syndical doit être impliqué dans le choix du bureau d’étude et dans l’élaboration du rapport.