ABUS 4002 Un syndic qui ne perd pas de temps et fait voter dans une seule résolution 5 points différents !
Voici l’exemple tiré d’une convocation concernant un vote de travaux totalement abusif. Une copropriété doit voter la réalisation de travaux de plomberie pour changer des colonnes montantes. Jusque-là, tout va bien, mais le projet de résolution quant à lui ne va pas du tout.
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I. Cinq décisions pour le prix d’une !
Ce syndic a proposé de mettre au vote la question suivante : « décision à prendre quant à la réalisation des travaux de plomberie ». En même temps qu’il demande à l’AG de se prononcer sur la réalisation de ces travaux, rendus nécessaires suite à des fuites régulières, il a proposé dans le projet de résolution de :
- voter un budget prévisionnel basé sur le devis le « mieux disant »,
- voter des honoraires du syndic de suivi des travaux,
- définir les modalités des appels de fonds pour la réalisation des travaux,
- donner mandat au syndic pour souscrire au nom et pour le compte du syndicat des copropriétaires un prêt auprès du crédit foncier et le contrat de cautionnement associé à l’emprunt, pour la réalisation de ces travaux.
II. Comment ces cinq décisions auraient d’être présentées
Tout d’abord, rappelons qu’une question doit être rédigée clairement et doit porter sur un point précis. Ici la question est bien précise puisqu’elle s’intitule « décision à prendre quant à la réalisation de travaux de plomberie ». Par contre le projet de résolution associé à cette question, lui, traite de 5 points différents.
1. Vote des travaux
Il aurait fallu voter les différents points suivants indépendamment les uns des autres dans différentes résolutions ou sous-résolutions.
Comme nous le rappelons dans le guide gratuit - « Comment faire ? n°15 : Les travaux de rénovation en copropriété » : (téléchargement gratuitement sur le site pour nos adhérents sur le lien suivant : www.arc-copro.com/gppb), voici comment aurait dû se présenter le vote de ces points.
Question n°1 : Décision à prendre quant à la réalisation des travaux de plomberie
Projet de résolution :
- 1er vote : L’assemblée générale décide de la réalisation des travaux de plomberie
- 2ème vote : elle décide de retenir l’offre de l’entreprise X pour un montant xxx € ou à défaut donne mandat au conseil syndical pour le choix définitif de l’entreprise pour un montant maximum de X €
- 3ème vote : elle fixe les modalités de financement des travaux de la manière suivante (nombres d’appels, dates des appels, montant des appels) …
2 . Vote des honoraires du syndic pour le suivi des travaux
Dans le projet de résolution proposé ici par le syndic, un budget global de travaux est prévu, intégrant les honoraires du syndic. Par ailleurs, en plus d’intégrer ses honoraires dans le budget global, une sous-résolution prévoit également le vote de ses honoraires pour suivi des travaux. Il fait donc voter à deux reprises ces honoraires. Compte-t-il les facturer deux fois également ? Comme le prévoit la loi du 10 juillet 1965 dans son article 18-1 A « Les travaux mentionnés à l'article 14-2 et votés par l'assemblée générale des copropriétaires […] peuvent faire l'objet d'honoraires spécifiques au profit du syndic. Ces honoraires sont votés lors de la même assemblée générale que les travaux concernés, aux mêmes règles de majorité. ». Le syndic ne peut pas noyer ces honoraires parmi tout un tas d’autres points.
Il est nécessaire d’autoriser les honoraires du syndic par un vote spécifique et dans l’idéal une question doit être dédiée à cela.
Question n° 2 : fixation des honoraires du syndic pour le suivi des travaux de plomberie
3. Financement par le recours à un emprunt bancaire et son cautionnement
Ce syndic a également proposé, en même temps que le vote des travaux et tout le reste, de souscrire à un emprunt bancaire pour financer les travaux.
Mais voilà, tout comme pour ses honoraires, ce point est noyé parmi tous les autres.
Ici, les copropriétaires ne savent pas quel type d’emprunt est proposé (collectif au nom du syndicat des copropriétaires ou au bénéfice des seuls copropriétaires décidant d’y avoir recours ?) ce qui peut changer radicalement le vote et la majorité nécessaire au vote (unanimité dans le cas d’un emprunt collectif, même majorité que les travaux dans le cas d’un emprunt à adhésion individuelle).
Le syndic n’a pas fourni les documents nécessaires au vote pour la souscription d’un emprunt bancaire à savoir : les conditions générales et particulières du projet de contrat de prêt ainsi que la proposition d’engagement de caution correspondant.
Il est nécessaire que l’Assemblée vote une question spécifique pour la souscription d’un emprunt et non pas simplement qu’elle donne mandat au syndic pour y souscrire. Donc, il aurait fallu une question spécifique :
Question n° 3 : Décision à prendre quant à la souscription d’un emprunt (nature de l’emprunt) et de son cautionnement.
Il peut être aussi prévu, éventuellement, une sous-résolution pour donner mandat au syndic de signer l’offre d’emprunt.
III. Conclusions
Si cette résolution « gigogne » avait été votée telle que, les copropriétaires n’auraient pas pu se prononcer réellement sur les différents points et notamment sur les honoraires du syndic ou encore sur l’emprunt bancaire qui peut être lourd de conséquences. De même, le sujet de l’emprunt pouvant inquiéter plus d’un copropriétaire, les travaux auraient pu être refusés en bloc alors qu’ils sont nécessaires et « urgents ».
Par ailleurs, une telle pratique aurait pu être un motif d’annulation de l’assemblée générale.
Cette assemblée générale ayant été repoussée, nous préférons taire le nom de ce syndic qui doit corriger la prochaine convocation. Il a été ainsi conseillé au conseil syndical de demander à ce que l’assemblée vote distinctement ces différents points afin que le procès-verbal présente une nouvelle rédaction plus conforme avec la loi.
IV. Rappel de nos conseils
Pour limiter les risques de contestation d’une décision, il faut un vote spécifique pour chaque décision à prendre.
Pour rappel, si vous êtes amenés à voter de futurs travaux, il est nécessaire que le conseil syndical soit associé à la préparation de l’ordre du jour concernant ces travaux et de l’ensemble des décisions qui en découlent, il ne faut pas négliger le rôle de contrôle et d’assistance du conseil syndical.
De même, le syndic, conformément à la loi du 10 juillet 1965 et à son décret d’application, doit préparer l’ordre du jour (art 26 du décret) ainsi que le budget prévisionnel (art 18-II de la loi) en association avec le conseil syndical.
Si des projets de résolution vous semblent « farfelus », que leur rédaction peut prêter à confusion ou limiter la prise de décision et que vous n’avez pas été associés à l’élaboration de l’ordre du jour et/ou du budget prévisionnel, pensez à rappeler au syndic ses obligations et vos droits. Vous pouvez demander à votre syndic, en vue des risques encourus par la copropriété (refus des travaux à cause d’un projet de résolution « fourre-tout », risques de contestation …) de convoquer à ses frais une nouvelle assemblée puisqu’il n’a pas respecté ses obligations.
Par ailleurs, en vue de futurs travaux, n’oubliez pas d’anticiper par la mise en place d’un fonds travaux. A ce sujet, nous vous invitons à consulter le dossier « ARC, fonds travaux et le PEC » sur notre site via le lien suivant : www.arc-copro.com/xs3q, ainsi que le guide ARC/Vuibert : « Décider et contrôler les travaux en copropriété ».