Non, Madame la Ministre, ne laissez pas les professionnels de l’immobilier décider de la composition de la future commission de contrôle
Décidemment, les professionnels de l’immobilier sont prêts à tout pour qu’une association indépendante et spécialisée dans le domaine de la copropriété comme l’ARC ne siège pas à la future commission de contrôle des professionnels de l’immobilier.
Pour mémoire, un amendement dans le projet de loi Egalité et Citoyenneté a été déposé, donnant aux pouvoirs publics la possibilité de modifier par voie d’ordonnance la composition de la commission de contrôle (voir notre article «
Grâce à la mobilisation des copropriétaires et des parlementaires, cette première tentative a avorté et la présence des représentants des cocontractants au sein de cette commission de contrôle, en particulier des associations, a été maintenue.
Plus fort encore, les parlementaires ont voté un amendement tendant à supprimer le Conseil National de la Transaction et de la Gestion Immobilière (CNTGI), composé majoritairement de professionnels de l’immobilier, pour créer une nouvelle instance qui le fusionnerait avec la future commission de contrôle.
Le souhait des parlementaires est donc d’avoir une instance dans laquelle les représentants des cocontractants soient des associations spécialisées dans leur domaine pour pouvoir se confronter efficacement aux professionnels de l’immobilier.
Avant de présenter la nouvelle tentative des professionnels de l’immobilier pour exclure légalement l’ARC de cette commission de contrôle, reprécisons les motivations des parlementaires à supprimer le CNTGI.
I. Une décision motivée
Depuis l’entrée en vigueur du CNTGI, on a pu constater les limites de cette instance qui a proposé des projets de décrets ou des avis favorables aux professionnels de l’immobilier.
On peut citer à titre d’exemple :
- Le projet de contrat type de syndic présenté par cette instance qui s’est avéré déséquilibré, à l’avantage des professionnels et qui grâce à l’action de l’ARC a été modifié in extremis ;
- le décret définissant le code de déontologie des professionnels qui s’est conclu sans véritables nouvelles avancées avec, surtout, une difficulté d’application pour le syndicat de copropriétaires ;
- le décret sur l’obligation de formation des syndics professionnels revue au minimum, permettant surtout aux chambres professionnelles de proposer aux salariés des cabinets de syndics adhérents des formations (un marché bien juteux).
De telles limites s’expliquent par le fait que le CNTGI est composé majoritairement de professionnels de l’immobilier dont les membres titulaires sont majoritairement PDG de grands groupes de syndic, qui disposent d’une bardée de juristes qui orientent au mieux les textes à l’avantage des professionnels.
Ainsi, au sein de cette commission sont présents comme membres titulaires : le PDG du groupe Foncia, le président de la FNAIM ou bien encore celui de l’UNIS.
De l’autre côté, nous avons des associations de consommateurs ayant une compétence générale dans le logement et non en matière de copropriété.
Malgré cette réalité, voyons l’amendement qui a été adopté au Sénat le 4 octobre dernier.
II. CNTGI et commission de contrôle : mêmes acteurs
Alors que les parlementaires ont souhaité la suppression du CNTGI avec une possibilité pour les associations compétentes de siéger à cette future commission de contrôle, le Sénat a purement et simplement démoli cette action.
C’est ainsi que l’article 33bis AF du projet de loi Egalité et Citoyenneté, dans sa version adoptée par le Sénat, prévoit « cinq représentants des consommateurs choisis parmi les associations de défense des consommateurs œuvrant dans le domaine du logement, agréées en application de l’article L.411-1 du code de la consommation et siégeant au sein du conseil mentionné à l’article 13-1. (...) ». En l’occurrence, il s’agit du CNTGI.
Ainsi, les sénateurs ont d’une part réhabilité le CNTGI mais ont prévu, en plus, que la commission de contrôle serait composée par les mêmes titulaires et suppléants que ceux du CNTGI.
Pour les professionnels, c’est donc le jackpot. Ils verrouillent le CNTGI en ayant une emprise sur les avis adoptés par cette instance, et à présent sur la commission de contrôle, puisqu’aucune des associations siégeant dans cette instance n’a de spécialisation dans le domaine de la copropriété.
III. Un projet de texte qui s’enlise au Sénat
Afin d’écarter absolument la présence de l’ARC de la future commission de contrôle, sous l’impulsion des professionnels, les sénateurs ont accepté un amendement qui est inapplicable.
En effet, l’amendement précise que la commission de contrôle doit être notamment composée de « cinq représentants des consommateurs choisis par les associations de défense des consommateurs ». Or, la loi HAMON du 17 mars 2014 précise que les syndicats des copropriétaires ne sont pas des consommateurs.
Ainsi, les représentants mentionnés à l’article 33bis AF du projet de loi Egalité et Citoyenneté ne représentent pas les intérêts des syndicats de copropriétaires.
Pire encore, l’article L411-1 du code de la consommation qui prévoit l’agrément des associations de consommateurs a été abrogé par une ordonnance du 14 mars 2016. L’article adopté par le Sénat n’a donc plus aucune réalité juridique.
IV. Une nouvelle campagne de mobilisation
Ce nouvel amendement adopté au Sénat a le mérite de présenter la situation :
- D’une part, nous avons des professionnels qui souhaitent un ordre ou, à défaut, une « pseudo commission » dans laquelle ils disposeront d’une réelle majorité ;
- d’autre part, les associations indépendantes et militantes comme l’ARC – qui sont spécialisées mais non agréées – et qui souhaitent obtenir la mise en place d’une commission de contrôle composée de personnes qualifiées dans les différents secteurs de l’immobilier que sont : la copropriété, la gestion locative et la transaction immobilière.
Il est donc indispensable que l’article 33bis AF du projet de loi Egalité et Citoyenneté soit amendé en profondeur en revenant au projet initial de la loi ALUR qui prévoyait au sein de la commission de contrôle :
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Pour cela, il est indispensable d’engager une nouvelle mobilisation de l’ARC, des copropriétaires et des parlementaires pour expliquer aux ministères du Logement et de la Justice qu’il n’est pas normal que les professionnels puissent dicter leurs règles dans les mesures d’application de la loi.
Nous allons donc saisir l’ensemble des députés pour dénoncer cette « farce » et inviter tous les copropriétaires de France à saisir leurs députés afin qu’ils obtiennent un amendement à cet article lors de la prochaine discussion devant l’Assemblée nationale, afin de garantir aux associations qualifiées comme l’ARC un siège au sein de la future commission de contrôle.
Suivez donc attentivement le site de l’ARC, nous y reviendrons très prochainement.