Le défaut de concertation du conseil syndical préalable à la convocation d’assemblée générale :
quels recours pour le syndicat ?
Les dispositions légales et réglementaires applicables à la copropriété peuvent manquer de précision, c’est alors à la jurisprudence d’interpréter ces textes.
C’est le cas de cette très récente position de la Cour de Cassation rendue sur les obligations du syndic à l’encontre du conseil syndical, en matière de concertation préalable à l’établissement de l’ordre du jour de l’assemblée générale.
Un copropriétaire, dans un immeuble sis à Clermont-Ferrand, sollicite la nullité des assemblées générales ordinaires de 2011 et 2012 de son syndicat pour motifs divers, dont l’absence de concertation entre le syndic et le conseil syndical dans l’établissement de l’ordre du jour de l’assemblée générale, comme cela est prévu par l’article 26 du décret du 17 mars 1967.
Dans un premier temps, en avril 2014, le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Clermont-Ferrand rend un jugement défavorable au copropriétaire (15/04/2014 n° 12 – 02976) qui décide alors d’interjeter appel.
La Cour d’Appel de Riom, en septembre 2015, confirme la décision de première instance (arrêt 07/09/2015, n° 14 – 01255).
Refusant ces 2 décisions, ce copropriétaire se pourvoit en cassation.
I- L’arrêt de la Cour de Cassation
L’arrêt de la Cour de Cassation rendu en décembre 2016 (01/12/2016 n° 15 – 26559) confirme la décision rendue par la Cour d’Appel, qui par ailleurs, n’avait fait que reprendre les motifs du TGI en 1ère instance et qui avait statué comme suit : « le défaut de cette concertation n’entraîne aucune nullité faute de texte prévoyant une telle sanction ».
Ainsi, la plus haute juridiction judiciaire écarte à son tour la nullité de l’assemblée générale pour cause d’absence de concertation entre le syndic et le conseil syndical pour l’établissement de l’ordre du jour, au motif que ce texte réglementaire ne prévoit pas expressément une telle sanction juridique : « Mais attendu qu’ayant exactement retenu que le défaut d’établissement de l’ordre du jour en concertation avec le conseil syndical n’était pas sanctionné, la Cour d’Appel, qui n’était pas tenue de répondre à un moyen inopérant, a pu rejeter la demande d’annulation de l’assemblée générale… ».
La seule crainte suite à une telle décision pourrait donc être que certains syndics continuent à établir illégalement l’ordre du jour de l’assemblée sans concertation avec le conseil syndical en toute impunité.
II. Comment protéger les intérêts du syndicat des copropriétaires ?
- Une obligation du syndic qui engage sa responsabilité
Si la nullité de l’assemblée générale n’est pas une sanction prévue par les textes, il n’en demeure pas moins que d’autres voies existent pour sanctionner un syndic qui passerait outre cette obligation de concertation :
- cela constitue une faute grave qui est susceptible d’entraîner une action en réparation par la partie lésée (conseiller syndical ou copropriétaire) sur le terrain de la responsabilité civile délictuelle (art. 1240 et s. du Code civil) ;
- la voie s’ouvre aussi pour une action en révocation de son mandat lors d’une assemblée générale ultérieure ;
- il reste possible de faire une demande de dommages et intérêts.
Nous vous encourageons à lire - si ce n’est encore fait - notre conseil du 10 janvier 2017 : www.arc-copro.com/tspm, qui commentait le fait que des membres d’un conseil syndical ont pu faire condamner leur syndic à des dommages et intérêts pour non-transmission de documents.
En conséquence, le conseil syndical doit redoubler de précautions pour mener à bien cette phase très importante dans la vie de la copropriété qu’est la préparation de l’ordre du jour et du budget. Ainsi, dès la fin de l’exercice comptable, le conseil syndical doit solliciter son syndic pour fixer une ou plusieurs dates pour :
- le contrôle des comptes ;
- l’élaboration du budget et de l’ordre du jour.
Les exercices comptables des copropriétés étant souvent calés sur la même période (exercices civils) il faut s’y prendre tôt pour fixer les échéances en tenant compte des plannings très chargés des syndics entre mars et juin.
- L’inscription de toute question à l’ordre du jour
Rappelons par ailleurs que le conseil syndical :
- a toujours la possibilité de notifier au syndic, comme n’importe quel copropriétaire la ou les questions, projets de résolutions et les pièces éventuelles qu’il veut faire figurer à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale, sur le fondement de l’article 10 du décret du 17 mars 1967 ;
- il doit veiller à réaliser cet envoi à une date suffisamment éloignée de la date probable d’envoi des convocations, afin que le syndic n’évoque pas une réception trop tardive.
Cette dernière voie doit toujours être privilégiée, lorsque la question s’avère sensible, telle que la mise en concurrence du contrat du syndic, et permet d’anticiper sur une obstruction du syndic en exercice.
Le non-respect de cette disposition est systématiquement sanctionné par les tribunaux.
Conclusion
Il s’agit d’un des premiers arrêts rendus en la matière sur le non-respect par le syndic de ses obligations à l’encontre du conseil syndical.
Si la demande en nullité n’est pas un fondement juridique pour contraindre le syndic à respecter l’obligation de concertation AVANT d’établir l’ordre du jour de l’assemblée, il existe cependant des moyens pour parvenir à imposer ses questions à l’ordre du jour :
- la mise en responsabilité du syndic pour non-respect de ses obligations ;
- la mise en œuvre des dispositions de l’article 10 du décret du 17 mars 1967 qui prévoit que tout copropriétaire peut demander par lettre recommandée avec accusé de réception (RAR) l’inscription d’une question à l’ordre du jour.