Attention aux délégations d’engagement de dépenses données au conseil syndical

10/05/2016 Dossier

 

Attention aux délégations d’engagement de dépenses données au conseil syndical

 

En parcourant les convocations des assemblées générales annuelles, une question litigieuse, inscrite à la seule initiative des syndics professionnels, revient régulièrement.

 

Il s’agit de la délégation de pouvoir donnée par l’assemblée générale au conseil syndical pour engager, en deçà d’un certain seuil, des dépenses courantes, mais également parfois des travaux relevant du pouvoir de l’assemblée générale.

 

I. Une résolution illégale et abusive

 

Voici un exemple des projets de résolution que nous continuons à trouver dans ces convocations d’assemblée générale : « montant maximum des marchés et contrats accordé au conseil syndical pour la réalisation de travaux sans convocation d’assemblée générale extraordinaire »

 

Une telle délégation est illégale, car d’emblée contraire à l’esprit de l’article 21 du décret du 17 mars 1967 qui précise « qu’une délégation de pouvoir donné (...), ne peut porter que sur un acte ou une décision expressément déterminée ». Or comme on le constate ci-avant la résolution est tout à l’opposé !

Elle est par ailleurs abusive, car elle viole le pouvoir de l’assemblée générale d’engager la dépense !   

II. Pas de mandat indéfini sans une vraie cogestion

  • un mandat confié au conseil syndical n’est licite, que lorsqu’il porte sur un objet déterminé (article 21 a) de la loi du 10 juillet 1965).

 

Or, la plupart des formulations trouvées dans les convocations contrôlées sont trop imprécises et donc irrégulières, telles que : « l’assemblée générale autorise le conseil syndical à engager les dépenses à hauteur d’un montant maximum de … euros pour des travaux ».

 

Ce type de résolution encourt tout bonnement une action judiciaire en annulation par un copropriétaire opposant ou défaillant, dans le délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal de l’assemblée générale par le syndic (art. 42 de la loi du 10 juillet 1965) ;

 

  • un mandat imprécis et indéfini est abusif, et l’initiative du syndic pour le faire porter à l’ordre du jour est rarement anodine.

 

Elle vise généralement à ce que le syndic se défausse de ses obligations en matière de gestion courante de l’immeuble (art. 18 de la loi du 10 juillet 1965) en se reposant sur le conseil syndical, qui ne dispose pas de la personnalité juridique lui permettant d’agir légalement et sereinement en la matière.

 

Autrement dit, le syndicat expose des bénévoles à un danger dont ils n’ont pas réellement conscience et pour lequel ils ne sont pas couverts.

 

Une possibilité de mandat « élargi » confié au conseil syndical a été introduit dans la loi du 10 juillet 1965 par la loi ALUR (du 24 mars 2014). Il s’agit  de la cogestion définie à l’article 25 a) de la loi.

 

Mais un tel mandat est cadré.

 

  • Il ne concerne que les copropriétés de 15 lots principaux ou moins.
  • Il ne concerne les dépenses du budget courant.
  • Il suppose que le conseil syndical soit couvert par une assurance « responsabilité civile ».

 

À ce sujet voir notre dossier : www.arc-copro.com/xcef

 

III. Les recommandations de l’ARC

 

Face à cette manipulation du syndic, voire aussi quelques fois à l’initiative de conseils syndicaux « tous puissants », il convient de réagir de la façon suivante :  

 

Lorsque la question figure dans la convocation qui a été notifiée :

 

  • soit rejeter en assemblée générale, par un vote « contre » une telle autorisation d’engagement au profit du conseil syndical aux contours trop approximatifs (objet non déterminé) ;
  • soit considérer cette question comme illégale et demander au Président de séance de la retirer de l’ordre du jour, ou aux copropriétaires de refuser de voter.

 

Lorsque la question figure dans le projet de convocation qui est soumis par le syndic, au conseil syndical, lors de la réunion préparatoire :

 

  • le conseil syndical doit s’opposer à l’inscription de cette question avec les arguments énoncés ci avant ;
  • le conseil syndical peut proposer éventuellement de porter à l’ordre du jour une délégation de pouvoir précise au conseil syndical, s’il s’avère que l’un des points inscrits dans cette convocation nécessite une action « d’ajustement », qui pourrait être assurée par le conseil syndical. Par exemple : si un contrat doit être renégocié, mais que des éléments sont en attente de précisions au moment de finaliser l’ordre du jour, il peut être prévu d’inscrire un mandat confié au conseil syndical concernant précisément ce contrat, dans la limite d’un plafond déterminé.

 

Lorsque la copropriété comporte, au plus, 15 lots principaux (art. 25 alinéa a) de la loi du 10 juillet 1965) :

 

  • comme expliqué précédemment, le conseil syndical peut solliciter une délégation de pouvoir concernant les dépenses courantes relevant du budget prévisionnel de fonctionnement de l’immeuble.

 

Il s’agit dans ce cas d’une cogestion entre le syndic et le conseil syndical pour les opérations courantes relevant du budget prévisionnel.

 

 

Elle implique, selon l’ARC, en plus des obligations rappelées au point II., la mise en place d’une convention de cogestion adoptée en assemblée générale, dans laquelle sera déterminé précisément son objet et ses modalités d’exécution (partage de compétence avec le syndic…) : www.arc-copro.com/skrh.

 

 

IV. Conclusions

 

Il faut donc, d’une part, faire attention au libellé des délégations et d'autre part ne pas accepter la délégation d’engagement au conseil syndical proposée par la majorité des syndics professionnels, et régulièrement présentée comme impérative.

 

La solution passe par un contrôle accru du conseil syndical lors de la rédaction de la convocation d’assemblée générale.