ABUS DE LA SEMAINE N° 4130 : Quand un syndic collecte les pouvoirs pour conserver son mandat. Cabinet MICHAU à Paris (75014)

12/07/2016 Abus Abus

ABUS DE LA SEMAINE N° 4130 :

Quand un syndic collecte les pouvoirs pour conserver son mandat.

Cabinet MICHAU à Paris (75014)

 

C’est l’histoire « abracadabrantesque » que viennent de vivre les copropriétaires de cette copropriété parisienne de 40 lots, à la suite de laquelle le nouveau conseil syndical élu en mai 2015 a adhéré à l’ARC.

 

I.   Un syndic sortant, qui manipule !

Des tensions sont rapidement apparues entre le syndic, cabinet MICHAU (75014) et ce nouveau conseil qui, pour remplir au mieux son récent mandat, a sollicité tout au long de l’année son syndic afin d’obtenir des documents et des informations relatifs à la gestion de leur copropriété.

 

L’exercice 2015 étant clos, le syndic avait fixé, en accord avec le conseil syndical, la date de l’assemblée générale pour la mi-avril 2016.

 

A la fin mars 2016 le conseil syndical n’ayant toujours pas de nouvelle de l’envoi de la convocation, conformément aux termes du 2ème alinéa de l’article 8 du décret du 17 mars 1967, la présidente a mis en demeure le syndic par lettre RAR de procéder à cet envoi.

 

Cette mise en demeure étant restée sans effet, la présidente du conseil syndical a convoqué l’assemblée générale en lieu et place du syndic en la notifiant également au syndic. Entre temps, le conseil syndical a aussi procédé à une mise en concurrence du syndic en place en joignant le contrat concurrent à cette convocation.

 

Quelque peu piqué au vif, le Cabinet Michau a alors adressé un courrier à tous les copropriétaires, ou presque, puisqu’il a sciemment omis les 3 conseillers syndicaux !

 

Dans ce courrier, en sus d’exposer ses arguments contre le conseil syndical (ce qui déjà en soit est déjà contestable) il est allé beaucoup plus loin en sollicitant les copropriétaires qui ne pouvaient être présents afin qu’ils lui adressent leur pouvoir en blanc !

 

Voici un extrait de cet incroyable courrier rédigé par ce syndic professionnel :

 

« Nous vous conseillons vivement de ne pas adresser vos pouvoirs à XXXXX, en effet trois personnes ne doivent pas arbitrairement diriger une copropriété en choisissant leur syndic, leur avocat, leur maître d’œuvres. Les pouvoirs peuvent être adressés au cabinet Michau qui les distribuera à des personnes qui respecteront vos choix de votes.

Le syndic proposé débute dans la profession et n’a déposé aucun compte, votre devoir en tant que copropriétaire est également de contrôler ce que des bénévoles « non professionnels» vous proposent. »

 

II.  Quand le syndic considère être la voix de la raison pour la copropriété 

Les termes de ce courrier sont édifiants :

 

  • Le conseil syndical n’a effectivement pas la faculté de diriger arbitrairement une copropriété : il a cependant la faculté de proposer à l’assemblée générale un autre syndic, un avocat ou un maître d’œuvre que le syndic en place pourrait ne pas souhaiter voir intervenir. Ensuite, c’est l’assemblée générale qui décide.

 

Pour mémoire, c’est le syndic qui est le seul mandataire du syndicat des copropriétaires. C’est lui seul qui peut engager et donc signer un contrat, sauf si l’assemblée générale a mandaté une autre personne pour cela. Ce n’est donc pas le conseil syndical qui dirige. Il contrôle et assiste le syndic conformément aux dispositions de l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965.

 

Le syndic Michau emploi le terme « arbitraire » (qui dépend de la volonté, du bon plaisir de quelqu'un et intervient en violation de la loi ou de la justice) à l’encontre des actions menées par le conseil syndical. Or, ici le conseil syndical a agi dans l’intérêt du syndicat de copropriétaires et conformément à la loi. Mais il semble que cela ne corresponde pas vraiment aux intérêts de ce syndic, bien différents des intérêts des copropriétaires…

 

Qualifier d’arbitraires les actions menées par le conseil syndical est abusif et totalement inapproprié.

 

  • Quand aux copropriétaires s’ils ne veulent pas être « dirigés » par certaines personnes du conseil syndical, ils disposent de leur droit de vote à l’instant de renouveler leur mandat.

 

  • L’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que « Le conseil syndical peut se prononcer, par un avis écrit, sur tout projet de contrat de syndic ».

A contrario, le syndic n’a pas cette faculté, il ne peut donc émettre aucune critique (par ailleurs infondées) sur un concurrent.

 

Peut-on se permettre de faire remarquer que cela est par ailleurs très clairement en contradiction avec la disposition de « confraternité » du nouveau Code de déontologie des syndics défini par décret : (voir : www.arc-copro.com/93qi).

 

  • Le syndic n’a pas non plus à joindre un avis sur les résolutions proposées par le conseil syndical et inscrites à l'ordre du jour de la convocation, ni bien sûr à présenter de manière négative l’action du conseil syndical, en laissant sous-entendre une certaine incapacité.

 

III.  Le syndic Michau se porte destinataire des pouvoirs en blanc et choisira à qui les confier…

Compte tenu de la rédaction du courrier mentionné précédemment, il n’y a aucun doute sur les intentions de ce syndic. Sans détenir aucun mandat (la loi le lui interdisant) il n’en détourne pas moins l’esprit de l’article 22 de la loi du 10 juillet 1965 en réclamant des pouvoirs « en blanc ».

 

En effet la jurisprudence a déjà statué sur le devenir des pouvoirs en blanc (sans indication du mandataire) : ils sont valides dès lors qu'ils ne sont pas distribués par le syndic lui-même et à des mandataires choisis par lui (Cass. 3e civ. 28 mars 1990, n° 88-16.259) !

 

A contrario un arrêt (Cass. 3e civ. 20 nov. 1996, n° 95-10.134) a admis la validité des pouvoirs en blanc adressés au syndic « dès lors qu’il n’est pas rapporté la preuve que le syndic ait utilisé ce mandat de manière à fausser le résultat d’un vote pour nuire aux intérêts de la copropriété ou d’un copropriétaire. »

 

IV. Conclusion

Si ce syndic est réélu grâce aux pouvoirs qu’il a distribués, tout copropriétaire opposant ou défaillant pourra demander l’annulation, au moins de la résolution sur l’élection du syndic, par voie judiciaire.

 

Au regard de telles pratiques, nous sommes évidemment soulagés de savoir que les syndics doivent maintenant respecter un Code de déontologie... Mais à quand une véritable Commission de contrôle paritaire capable de prononcer des sanctions ?!